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LA VOIE SOUFIE
 
Yves Bernard, Le Devoir, Montréal, 28/10/06
 
Aïssawaniyya arrive sur scène avec, d’un coté, saxos, basse, batterie pour faire résonner le jazz contemporain et, de l’autre, la ghaita, type de hautbois strident, et une panoplie d’instruments de percussion pour la transe.
 

Ce soir, le théâtre Corona propose une spectaculaire rencontre entre le groupe de jazz français Niyya et les Marocains de la confrérie Aïssawa de Fès. Cette rencontre s’inscrit dans une recherche menée par le saxophoniste Mehdi Nabti, qui, parti étudier la musique classique au Maroc en 2000, est entré en contact avec des musiciens de la confrérie qui l’ont initié à leur rituel. Depuis, le Français d’ascendance Kabyle a étudié, décortique et transcrit rythmes et mélodies, les a expliqué à ses collègues jazzmen de l’hexagone, est revenu au Maroc pour établir les ajustements nécessaires, puis a formé avec le chef des Aïssawa de Fès, Haj Azedine Bettahi, ce groupe si particulier qui donne à Montréal sa troisième représentation à vie. Contrairement à certaines aventures fortuites, tout cela s’est établi petit à petit. « Chez vous, nous jouons pour la première fois avec Haj Azedine Bettahi, qui est le juge et leader des Aïssawa de Fès. C’est lui qui est responsable d’arbitrer et de sanctionner les conflits dans la confrérie. Il établit également le lien entre le Palais Royal et la communauté de croyant. Il est à la fois un chef spirituel et le directeur d’un orchestre de musique rituelle. Lors des représentations du culte, il joue le tabla, l’instrument principal qui permet de diriger l’orchestre. »

Avec leur doctrine mystique, les invocations de Dieu et les répétitions de litanies qu’ils font durant le rituel, les Aïssawa représentent, sur le plan spirituel, une confrérie dans le sens le plus classique du terme. « Mais ils se distinguent nettement sur le plan artistique en incorporant à leur répertoire tous les genres et tous les rythmes marocains, y compris ceux des autres confréries, explique Mehdi Nabti, directeur musical du projet. La cérémonie habituelle commence par des prières, suivies par des chants de poésies et culmine vers une séance de danse de transe. Lors de cette danse, les femmes, cheveux détachés, dansent avec les hommes et réalisent des mouvements pour mener à l’extase. Cette chorégraphie peut être jugée sensuelle et provocante. A cause de cela, mais aussi à cause du système de croyance qui sous-tend la cérémonie, les Aïssawa ne sont pas très bien perçus au Maroc, qui reste une société très conservatrice. Les orthodoxes de tous bords ne cautionnent pas leur rituel où le spirituel se mêle au ludique », soutien l’instigateur de la formation Aïssawaniyya, qui arrive sur scène avec, d’un coté, saxos, basse, batterie pour faire résonner le jazz contemporain et, de l’autre, la ghaita, type de hautbois strident, et une panoplie d’instruments de percussion pour la transe. Rendez-vous avec la ferveur et l’au-delà…